Daniel Boulud : « Dans les plats contemporains, on ne sait pas toujours où l’on habite »

26 jan 2015
Catégorie : Actualité Chefs & Restaurant, Chefs, Presse & Médias

F&S Le quotidien Lyonnais  » Le Progrès  » est allé à la rencontre du chef franco/américain Daniel Boulud, c’est lui qui a la lourde tâche de coordonner le dîner des Grands chefs organisé par GL Events pour les 50 ans de trois étoiles au Michelin du chef Paul Bocuse. Le gratin de la cuisine mondiale sera à table à l’hôtel de Ville de Lyon, autant dire que la soirée va être TOQUÉE !

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« Dans les plats contemporains, on ne sait pas toujours où l’on habite »

Gastronomie Daniel Boulud, le chef d’origine lyonnaise, qui a fait fortune à New-York, est de retour à Lyon, pour le Sirha. Il sera à la manœuvre mardi soir pour le Dîner des Grands chefs : 260 cuisiniers du monde réunis à l’Hôtel-de-Ville de Lyon, en l’honneur et en présence de Paul Bocuse.

Interview :

Dans quel état d’esprit avez-vous préparé le dîner des grands chefs ?

Il y a deux ans j’étais spectateur au dîner des grands chefs, c’était super et c’est là qu’il m’a été proposé de faire un dîner à thème sur les Amériques pour l ‘édition suivante. J’ai rassemblé quelques collègues pour faire une petite brigade, quatre très bons chefs qui n’ont jamais cuisiné en France, 2 d’Aérique du sud, 2 d’Amérique du nord, et nous voilà à cuisiner pour 260 convives. J’ai un peu d’expérience de traiteur, donc je pense que tout devrait bien se passer.

Quel sera le menu ?

L’hôtel de ville de Lyon est un très beau lieu mais il n’est pas fait pour la cuisine, donc il fallait penser à des plats simples et je voulais des plats qui parlent de la culture des chefs, de leur histoire…/… Le tout arrosé par les vins de Chapoutier de Tain L’Hermitage.

Boulud

Vous êtes aux Etats-Unis depuis bientôt 30 ans, qu’avez vous apporté à la gastronomie américaine ?

Dans les années 50, beaucoup de plats français traditionnels étaient servis dans les palaces et les restaurants transatlantiques. Mais cette restauration était en décalage avec la nouvelle cuisine française telle que je l’ai apprise. Je voulais faire un restaurant ambitieux par sa cuisine, mais pas prétentieux, convivial, c’est pour cela que je l’ai appelé «  Daniel «, que j’ai ouvert il y a 22 ans. À New York, on a de la chance d’avoir la côte atlantique, une terre extraordinaire pour les jardins, les quatre saisons… un peu comme à Lyon, mais avec la mer en plus !

Mais y a t’il une véritable gastronomie américaine ?

Oui, une partie est issue de la cuisine française, et une autre des cuisines asiatiques, sud-américaines, mais aussi de terroir, avec le mouvement « farm to table «. Ce n’est donc pas très homogène. Les Italiens rentent très Italiens par exemple, ils sont hypers pointus, vraiment très forts, l’autre jour j’ai dîné chez un chef qu a fait un truc de folie : des raviolis avec 800 jaunes d’eoufs au kilo !

Vous reconnaissez vous dans cette génération de chef qui sont des « peoples « ?

Mais quand j’étais jeune chef, Paul Bocuse, Roger Vergé, Michel Guérard étaient déjà des stars. En revanche, je crois que la fraternité entre les chefs, initiée par Paul Bocuse, n’est plus d’actualité, il y a davantage de compétition au sein de la nouvelle génération. Et la gloire est plus éphémère.

Boulud

Quelle idée vous faites vous d’un bon chef ?

Un bon chefs sait bien choisir ses produits, ses cuisiniers, ses fournisseurs… et se mentors. J’en ai eu plusieurs, et même si je ne voulais pas faire leur cuisine, j’ai beaucoup appris avec eux. Et surtout il faut être généreux, avec le beurre dans la sauce, la truffe dans les plats, et surtout avec soi-même. Il doit aussi penser à l’équilibre des vins qui iront avec les plats.

Est ce toujours un métier aussi difficile et exigeant ?

Oui, mais il est meilleur aujourd’hui. Même le patron est content que le restaurant soit fermé deux jours par semaine. On a plus le choix, il faut faire du social, le faire bien et le respecter. Faire la cuisine ce n’est plus l’enfer. Aux Etats-Unis on est aux 40 heures, mais nos cuisiniers travaillent 60 à 70 heures par semaine, payés en temps simple et en temps double, ils gagnent bien leur vie.

Quelle est la place de la gastronomie française aujourd’hui ?

C’est notre patrimoine, et bien sûr il nous faut réinventer notre passé. la gastronomie française se porte vraiment très bien, en France et à l’étranger. Mais on est plus les maîtres suprêmes, car il y a des talents extraordinaires partout maintenant.

Quelle est votre madeleine de Proust ?

Je suis Lyonnais avant tout ! … J’aime la cuisine de tradition, comme une bonne poule au pot truffée sous la peau avec un sauce suprême. Un plat bien identifié. Dans les plats contemporains, on ne sait pas toujours où on habite.

Où en est votre projet d’ouvrir un restaurant à Lyon ?

Ce n’est pas moi, mais un de mes anciens chefs, et j’ai promis de l’aider et de le parrainer. Ça se fera mais se sera plutôt un bistrot.

Vous avez perdu une troisième étoile au Michelin, est ce que cela représente un désaveu pour vous ?

Ça fait trente ans que je suis aux Etats-Unis et je n’ai pas attendu Michelin pour me faire un nom. J’encaisse les coups, mais on va remonter sur le stade. J’ai toujours cuisiné pour mes clients, et pas pour les guides, je ne suis pas assez politique pour ça.

Qui allez vous soutenir au Bocuse D’Or ?

Bien que je sois lyonnais, et français, je soutiens le candidat américain, le Californien Fil Tessier, sous-chef chez Thomas Keller. Cette année je pense qu’on fera un bon résultat.

Propos recueillis par Françoise Monnet.

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