La guerre du pain est lancée en Asie

23 juin 2015
Catégorie : Tendances

F&S Une enquête très intéressante du journal économique – Les Échos – qui est parti enquêter en Asie sur l’implantation en masse de boulangeries françaises, qui n’ont rien de françaises mais totalement intégrées dans des conglomérats asiatiques qui ont bien anticipé cette affection des consommateurs pour le pain au chocolat, le croissant et la baguette française …

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pain français

A Pékin, Tokyo, Séoul, Hanoï, les rues sont saturées de boulangeries sous les enseignes – Paris GâteauxVie de FranceParis Baguette – … Mais aucun de ces magasins n’est français. Une poignée d’acteurs hexagonaux tentent, aujourd’hui, de se faire une place sur ce marché trusté par de puissants groupes asiatiques.

BreadTalk

Vendre l’image de la France sans y mettre les pieds 

Décoration élégante, dans les vitrines, du flan nature, des jambon-beurre et des quiches. Et même de la musique de Christophe Maé. Les rues de Pékin, Séoul, Tokyo ou Hanoï sont saturées de boulangeries toutes décorées de drapeaux bleu-blanc-rouge et de tour Eiffel. Mais aucun de ces magasins n’est français. 

Par rapport aux concurrents asiatiques, la France a pris un certain retard. Les acteurs japonais et coréens ont perçu, très tôt, le potentiel énorme de ce marché de la boulangerie. Et ils sont naturellement extrêmement actifs partout en Asie.

Paul

Au Japon, Brioche Dorée ( 500 magasins dans le monde ) a ouvert sa deuxième boulangerie, 7 ont été inaugurées en Corée du Sud et 2 en Chine. L’enseigne Paul du groupe Holder, exploite, une douzaine d’adresses en Asie du Sud-Est et prévoit six inaugurations avant la fin de l’année sur ce marché en pleine expansion.

 

La baguette de pain, un produit typiquement français

Si le Vietnam, le Cambodge ou le Laos, autrefois colonisés par la France, ont une culture du pain, la boulangerie ne faisait pas partie, jusqu’à peu, des régimes alimentaires de la région, dominés par le riz ou les nouilles de blé et de sarrasin.

En Chine, en Corée ou en Malaisie, les habitants ne consommaient traditionnellement que des petits pains briochés, souvent fourrés de viande hachée, cuits à la vapeur. Le pain de mie n’arrivera au Japon qu’après la Seconde Guerre mondiale, lorsque les Etats-Unis, qui contrôlaient alors l’Archipel, ont commencé à livrer du blé au pays confronté à une grave pénurie alimentaire.

Le pain à la française ne commencera véritablement sa conquête de l’Archipel, puis des grands pays environnants, qu’au début des années 1960 avec Raymond Calvel, un grand voyageur, professeur de boulangerie à l’Ecole nationale supérieure de meunerie. Il attirera à Tokyo des jeunes « missionnaires » de la baguette, qui s’installeront à leur compte dans les années 1980. D’autres indépendants français ont ensuite monté leur réseau.

 

Kayser le plus présent en Asie pour l’instant

Kayser

La Maison Kayser, du boulanger Eric Kayser, est aujourd’hui la plus présente en Asie. Depuis son installation au Japon en 2002, elle a ouvert des boutiques en Corée du Sud, à Hong Kong, Manille ou encore Phnom Penh, avant de tenter le Moyen-Orient et l’Amérique du Nord. Désormais, le groupe artisanal français compte une centaine d’adresses dans 20 pays.

Ses concurrents asiatiques opèrent, eux, déjà plusieurs milliers de boutiques et se présentent en conquérants sur tous les marchés de la planète. La franchise – Tous les Jours – du conglomérat coréen CJ Foodville, autrefois lié à Samsung, contrôle ainsi 1.280 boulangeries en Corée du Sud et 160 boutiques à l’international.

En Chine, aux Philippines ou au Vietnam, ses magasins décorés de bois clair et de briques rouges vendent sous une inscription « Boulangerie fraîche et authentique » des fougasses au fromage, des croissants aux amandes, mais aussi des brioches à la sauce pomme-gorgonzola.

vie de france

Très présent aussi en Chine avec près de 300 adresses, le singapourien – Bread Talk – compte, désormais, un réseau asiatique de 820 boulangeries.

Essentiellement implantée au Japon, la chaîne – Vie de France – contrôlée par le groupe nippon Yamazaki, a plus de 210 échoppes.

Les Coréens très actifs sur le créneau

Le sud-coréen – Paris Baguette – contrôlé, lui, par le conglomérat SPC, a dessiné un plan d’expansion censé lui permettre de diriger plus de 6.000 boutiques dans 60 pays d’ici à la fin de 2020. Il gère actuellement 3.200 franchises en Corée du Sud et près de 200 boulangeries à l’étranger.  Hur Young-in, le président de SPC a inauguré quelques semaines plus tôt, sa première boulangerie… à Paris, dans le quartier du Châtelet.

Paris-Baguette

Pour s’imposer, SPC a appliqué à la boulangerie les recettes qui ont fait le succès des grands conglomérats sud-coréens dans l’électronique, l’automobile ou la construction navale.  Pour accompagner son expansion et se garantir des approvisionnements stables, le groupe s’est ainsi offert, en 2008, Mildawon, un grand producteur de farine du pays. Organisant sa montée en gamme, le groupe SPC a ensuite été le premier producteur coréen à importer du blé français pour le transformer localement en farine, convaincu que la céréale française riche en minéraux et pauvre en protéines, est la plus adaptée pour produire une croûte croustillante pour ses baguettes et son pain de campagne.

Des entreprises menées comme des multinationales 

Le géant a encore multiplié les accords de partenariats avec des fermes sud-coréennes, notamment dans la région de Pyeongchang, lui fournissant ses autres ingrédients, comme les fraises qu’ils utilisent massivement dans ses gâteaux à la crème.  Pour assurer une standardisation complète, il fut le premier en Corée du Sud à utiliser les pâtes congelées « bake off », qui sont distribuées aux franchises pour y être cuites à la dernière minute. Développant ses propres réseaux logistique, le groupe assure deux livraisons par jour de produits à ses boulangeries qui captent désormais, selon Euromonitor, 18 % du marché du fast-food sud-coréen, quand McDonald’s en détient seulement 7 %.

breadtalk

Fort de ce gigantisme domestique et d’une maîtrise de l’ensemble de la chaîne de production, le groupe se concentre désormais sur l’international où il affronte – Tous les Jours – ou – Bread Talk –  .  Aucun acteur de la boulangerie française ne dispose d’une telle assise domestique, c’est un problème que partagent, quelle que soit leur industrie, nombre d’entreprises françaises.

Les français doivent rester des artisans pour rester influent sur ce marché 

S’ils reconnaissent la force de frappe de leurs concurrents asiatiques, les boulangers français estiment toutefois que cette poussée alimente leur propre croissance. Pour trouver leur marché les français vont cibler le marché de niche de qualité, alors que les groupes asiatiques optent pour un marché de masse.

Si les viennoiseries et les pains de ses boulangeries asiatiques sont importés congelés depuis des usines françaises, la garniture des sandwichs et des desserts est réalisée localement. Rejetant les pains ou viennoiseries aux goûts locaux que multiplient les chaînes asiatiques, Brioche Dorée et Paul se consacrent au 10 % français, et adaptent le contenue en sucre et en matières grasses.

vie de france

Mauvaise expérience à Shanghai avec un investisseur privé

S’inspirant tout de même de leurs concurrents asiatiques, les boulangers français cherchent à s’appuyer sur de grands partenaires pour se développer dans la région. Paul, qui s’était attaqué dans les années 2000 au marché chinois à Shanghai en franchisant avec un particulier, il a dû fermer toutes ses boulangeries en même pas deux ans.  

Paul ne travaille plus qu’avec des professionnels de la distribution ou de l’agroalimentaire, il est indispensable de développer ses franchises avec un partenaire local, il aide dans les relations avec l’administration, dans la compréhension des règlements locaux ou encore dans la négociation d’emplacements à des conditions normales .

Pour Brioche Dorée à Séoul, se sera avec le géant Daewoo, qui se propose d’ouvrir au total 90 boulangeries de la marque dans le pays, au Japon, c’est Suntory s’est engagé sur 105 emplacements sur les dix prochaines années.

« Il y a une certaine arrogance française à croire que l’on peut tout faire tout seul dans la région. C’est sûrement aussi un frein à la conquête des groupes français sur ces marchés », explique le cadre du groupe Le Duff.

Les Échos

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