» Clochemerles de tambouille  » et  » Thuriféraires de la haute gastronomie  » n’ont qu’à bien se tenir,  » la cuisine made in France  » est formidable !

21 juil 2012
Catégorie : Art, Culture & Traditions, Presse & Médias

Retrouvez un papier de Emmanuel Rubin sur le journal  » Les Échos « , qui remet certaines pendules à l’heure, les fondamentaux de la cuisine française continuent à faire vibrer la planète… la cuisine se fait devant les fourneaux, pas devant la télé… – une analyse intéressante -

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LA GASTRONOMIE FRANÇAISE LABOURE DE NOUVEAUX CHAMPS

Les cuisines françaises restent encore et toujours le lieu où faire ses classes, faisant ainsi prospérer à travers le monde un esprit tricolore.

La gastronomie française est une diplomatie comme les autres. Dès lors, il ne faut pas s’étonner de la voir invitée, du côté de 2012, au grand banquet de la mondialisation. Avant même de savoir si la France est encore une grande nation culinaire, peut-être convient-il d’abord de constater qu’elle n’est plus la seule. Depuis vingt ans, avec un certain parallélisme avec la géopolitique internationale, la superbe de la cuisine tricolore se voit régulièrement remise en cause. Du moins en question. Et le petit monde des grandes tables de se quereller régulièrement sur la place réelle que cette très chère Cocagne occuperait désormais dans le concert mondial, fût-il celui des casseroles. Ses contempteurs affirment que cette place ne vaut plus vraiment le goût.

Suivre le chemin des  » Anciens « .

La domination se jouerait ailleurs, plus loin, du côté des nouvelles puissances et des régions émergentes. Nations que l’on n’attendait plus, à l’instar de l’Espagne ou de la Grande-Bretagne, ou pays qu’on n’espérait pas, comme la Suède ou le Danemark… Ainsi, lorsque critiques et historiens, le plus souvent étrangers, ne ramènent pas la fraise de leur science pour qualifier la chute du modèle hexagonal – dernier opus en date, La Cuisine française, un chef-d’œuvre en péril (Fayard, 2011), de l’Américain Michael Steinberger -, les déclinologues ès popotes s’appuient sur des palmarès où les tabliers bleu-blanc-rouge brillent par leur discrétion. En dix années d’existence, le fameux The World’s 50 Best Restaurants du magazine anglais Restaurant a plébiscité à sa tête l’Espagnol Adriá, le Britannique Blumenthal et le Danois Redzepi. Les thuriféraires de la haute gastronomie française, eux, comptent leurs précieuses étoiles Michelin et se rassurent avec un classement au Patrimoine mondial immatériel de l’Unesco.

Au final, que retenir de ces Clochemerles de tambouille ? Ni mieux que des concours de toques où chacun s’escrime à savoir lequel a la plus haute, ni plus que des barnums culinaro-médiatiques n’amusant finalement que ceux qui y participent. Car si la cuisine française n’est plus dominatrice (colonialiste ?), elle reste d’une formidable influence. Au chapitre du rayonnement planétaire, là où un quarteron de cuistots jouait les porte-drapeaux dans les années 1980, on ne compte plus actuellement le nombre de chefs français essaimant adresses et savoir-faire à travers la planète : Ducasse, Robuchon, Gagnaire, Darroze, Pourcel, Hermé, Hévin, le menu tient de la rallonge.

Ne pas pas oublier les traditions.

Un talent à s’exporter qui trouve un épatant pendant dans le pouvoir d’attraction des brigades « cocorico ». Forts d’avoir inspiré ou formé nombre d’idoles du nouveau paysage gastronomique international, les fourneaux cocardiers magnétisent encore et toujours les apprentis des cinq continents. Une caisse de résonance que renforce l’énergie française à renouveler ses élites et réinventer les genres. Les années 2000 auront ainsi vu l’éclosion d’une génération de chefs, trentenaires ou frais quadras sortis des jupes des grandes maisons (Camdeborde, Aizpitarte, Ledeuil…) et prodigues à ouvrir de nouveaux champs d’expression (fusion food, néoterroir, locavorisme…).

S’inspirer et créer sans perdre son âme.

Ainsi, là où les jeunes nations gastronomiques se réfugient trop souvent derrière les grands arbres de leurs grands chefs masquant les déserts qui les accompagnent, la France nourrit une pépinière à nulle autre pareille. Ouverte, détendue, élargie, la cuisine made in France s’affirme comme l’une des rares à comprendre que l’avenir gastronomique ne se situe plus seulement et forcément du côté des cimes. Ainsi, le succès de la veine « bistronomique », orchestré par des personnalités capables de disposer une cuisine d’auteur à l’attention d’un public élargi, autour de manières décomplexées (décor, service, addition), et amplifié par des mouvements critiques tel le Fooding, témoigne à lui seul d’une épatante vitalité. Voilà peut-être pourquoi, si la France n’est plus le nombril gastronomique de la planète, elle en demeure néanmoins l’esprit.

EMMANUEL RUBIN

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